Le monde des solides poreux en deuil

C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès, le 19 août dernier, du professeur Gérard Férey, l’un des pionniers des solides poreux cristallisés, en particulier ceux hybrides inorganiques-organiques de type MOFs ou Metal-Organic Frameworks.

Gérard est né en Normandie en 1941 et a connu plusieurs vies scientifiques. Tout d’abord, à l’université du Mans à partir des années 60, où après quelques succès sur l’étude de fluorures métalliques magnétiques, il s’est investi dans le monde des fluorophosphates métalliques microporeux. Dès cette époque, Gérard accorde un soin particulier à l’étude des mécanismes de formation ainsi qu’à la genèse contrôlée de ces solides, avec l’appui de la modélisation numérique. En 1996, il quitte l’université du Mans pour créer l’Institut Lavoisier de Versailles. Débute alors son aventure fascinante dans le monde des MOFs, dont il fut l’un des leaders internationaux incontestés pendant près de 15 ans. Plusieurs succès retentissants avec la découverte de séries de MOFs de référence dans le domaine lui valent ce statut. On citera tout particulièrement les solides à flexibilité géante MIL-53 et MIL-88 (MIL pour Matériaux de l’Institut Lavoisier), les solides à pores géants de type MIL-100 et MIL-101 et le premier MOF poreux photoactif à base de titane MIL-125. Son implication dans la recherche d’applications potentielles des solides MIL, notamment pour la séparation des gaz, la catalyse, l’énergie ou la biomédecine, est tout aussi notable.

Au fil des années, de nombreuses récompenses sont venues saluer ce travail : la médaille d’Or du CNRS, le prix ENI de l’environnement, le prix Von Humboldt ne sont que quelques exemples. Membre de l’académie des Sciences et chevalier de la légion d’honneur, Gérard Férey a toujours été un ardent défenseur de la chimie, qui a cherché tout au long de sa carrière à transmettre sa passion pour la chimie, à ses jeunes collègues, aux étudiants mais aussi aux lycéens.

L’héritage laissé par Gérard Férey est immense, en témoigne l’activité toujours très intense de la communauté MOFs autour des fameux solides poreux de type MIL. Les enjeux restant à relever se situent principalement autour de la découverte de MOFs à stabilité renforcée (chimique) mais aussi de leur intégration dans des procédés ou dispositifs applicatifs.